26‏/06‏/2013

Cahuzac : "Victime de moi-même"


L'ancien ministre du budget, Jérôme Cahuzac, a été entendu mercredi 26 juin par la commission d'enquête parlementaire qui doit, d'ici septembre, faire la lumière sur le fonctionnement de l'Etat dans l'affaire concernant son compte bancaire à l'étranger. Tour à tour mettant et retirant ses lunettes, prenant des notes, demandant à plusieurs reprises aux députés de ne pas lui demander d'"étaler ses sentiments personnels", il est apparu fatigué, la voix régulièrement bloquée par l'émotion, n'hésitant à évoquer sa "douleur".

  • La connaissance de l'enregistrement "le jour où Mediapart a décidé de le mettre en ligne"
Interrogé pour savoir quand il avait eu connaissance de l'enregistrement révélé par Mediapart le 4 décembre (une conversation téléphonique, datant de 2002 dans laquelle il évoquait avoir un compte UBS en Suisse), Jérôme Cahuzac a déclaré que cela était "le jour où Mediapart a décidé de le mettre en ligne""Je n'en avais jamais entendu parler auparavant", a assuré M. Cahuzac. A la question de savoirqui avait remis l'enregistrement au site d'informations en ligne, il a répondu : "Il me semble que seules deux personnes peuvent l'avoir fait, Michel Gonelle et Jean-Louis Bruguière".
  • "Cette affaire éclate au moment où elle va faire le plus mal"
Dénonçant à demi-mot un complot politique à son encontre, Jérôme Cahuzac a affirmé n'avoir que "des hypothèses" quand au moment où l'affaire a éclaté. Entre le moment où l'enregistrement a été réalisé et aujourd'hui, "il y a eu des élections, à Villeneuve-sur-Lot et ailleurs, a-t-il constaté. Il y a eu des tentatives pour faireressortir cette affaire, mais personne n'en a parlé publiquement jusqu'au 4 décembre 2012." "Incontestablement, quand on refait la chronologie, cette affaire éclate au moment où elle va faire le plus mal", a-t-il ajouté.
  • Cahuzac confirme avoir reçu en décembre un appel du directeur de cabinet de Hollande
L'ancien ministre du budget a confirmé mercredi avoir reçu le 15 décembre un appel téléphonique d'Alain Zabulon, comme l'a indiqué il y a quelques jours le directeur de cabinet adjoint de François Hollande devant la commission d'enquête parlementaire. "Il m'a informé d'un contact téléphonique. Le contenu, je n'en suis pas certain. Mais cette date est exacte", a déclaré M. Cahuzac. Il lui était demandé si M. Zabulon lui avait parlé ce jour-là d'un appel téléphonique qu'il venait de recevoir de Michel Gonelle, un ancien élu RPR ayant perdu la mairie de Villeneuve-sur-Lot au profit de M. Cahuzac, et qui avait déclaré au directeur de cabinet adjoint du président détenir l'enregistrement susmentionné.
Et quelle fut sa réponse à M. Zabulon ? "Que voulez-vous que je réponde à Alain Zabulon ? J'ai pris acte de ce qu'il m'indiquait, a dit l'ancien ministre. Et soit lui, soit moi, en tout cas avec l'un des deux avec l'assentiment de l'autre, a indiqué à son interlocuteur que la démarche pourrait paraître curieuse dès lors que si Michel Gonelle avait des choses à dire, peut-être la justice devait-elle être saisie d'abord."
  • Sa démission : "J'ai essayé de faire en sorte que ma décision soit la plus correcte possible"
"Le 19 mars, j'apprends que le procureur de Paris a ouvert une information judiciare contre moi. Je comprends que ma situation au sein du gouvernement devient intenable et je cherche à joindre le premier ministre pour lui indiquer je vais démissionner, a raconté Jérôme Cahuzac. Je le lui dis immédiatement. Il m'est arrivé de penser que les autorités de l'Etat avaient peut-être été alertées de cette décision du procureur avant l'envoi du communiqué. Je suppose que le président et le premier ministre sont arrivés à la même conclusion de moi et qu'ils ont dûchercher très vite par qui me remplacer. (...) J'ai essayé de faire en sorte que ma décision soit la plus correcte possible."
"J'ai indiqué avoir menti à la représentation nationale, au premier ministre et au président. Je n'ai plus en mémoire le moment où Pierre Moscovici et moi-même avons abordé cette affaire, mais je ne lui ai pas non plus dit la vérité, a ajouté l'ancien ministre du budget. Si je suis une victime, je suis victime de moi-même, et de personne d'autre."
  • Pas de contact avec Hollande et Ayrault... sauf à cause d'une erreur de numéro
Il a ensuite assuré n'avoir "pas eu de contact avec le président de la République et le premier ministre après [sa] démission". Avant de se raviser en invoquant "une période un tout petit peu troublée""Un jour, je reçois un coup de téléphone sur mon portable de Matignon, je ne sais plus si c'est entre le 19 mars et le 2 avril ou après le 2 avril, a relaté M. Cahuzac, la première date étant celle de sa démission du gouvernement et la seconde celle de son aveu public d'un compte non déclaré à l'étranger. On me dit que le premier ministre souhaite me parler. J'entends sa voix qui dit 'Allo, Bernard ?'. Je lui ai dit 'non ça c'est le nouveau ministre du budget...' Et il s'excuse de sa méprise. Je n'ai pas eu d'autre contact."

  • "Deux tabous que je n'ai pas transgressés, au moins"
"Il y a deux tabous que je n'ai pas transgressés, au moins", a expliqué Jérôme Cahuzac. "Le premier, contrairement à ce qui a été écrit : je n'ai jamais juré ne pas tenir de compte sur la tête de mes enfants, jamais. (...) Le deuxième tabou :mentir par écrit à l'administration dont j'avais la charge m'a semblé impossible."
  • "Informé personne" de la demande de Bercy sur ses comptes
Jérôme Cahuzac a affirmé qu'il n'avait "informé personne" de la demande qu'il avait reçue des services du ministère de l'économie et des finances sur ses éventuels comptes à l'étranger. Il avait trente jours pour répondre à cette demande et ne l'a jamais fait. L'administration fiscale devait laisser ce laps de temps passerafin de purger toutes les voies de recours possibles pour effectuer une demande d'entraide administrative à la Suisse.
Il a également assuré ne pas avoir eu de contact avec la garde des Sceaux,Christiane Taubira, ou le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, sur l'enquête préliminaire le concernant.
  • Refus de répondre pour ne pas empiéter sur "l'information judiciaire en cours"
L'ancien ministre du budget a en revanche refusé de répondre aux multiples questions qui lui ont été posées par le président de la commission, Charles de Courson, sur l'existence d'un compte dans la banque Reyl, entre 2006 et 2012, ou sur la date à laquelle il avait transféré les fonds à Singapour. Pourquoi ce silence ? Parce qu'à ses yeux ces questions empiètent "pleinement sur l'information judiciaire en cours" sur son affaire, qui marque la limite du travail de la commission. L'un des députés qui l'interrogeaient, Philippe Houillon, a rétorqué qu'un mis en examen dans une affaire judiciaire n'était "tenu à aucun secret que ce soit – et peut même mentir !".
  • L'intention d'écrire un livre, mais aucun contrat signé avec un éditeur
Comme un peu plus tôt dans la journée à Europe 1, Jérôme Cahuzac a démentiavoir signé un contrat avec un éditeur pour un livre. "Si j'ai bien l'intention d'écrire un ouvrage, je n'ai signé de contrat avec aucun éditeur, a-t-il assuré. J'en profite pour préciser que ceux-là même qui ont donné cette information ont indiqué un montant, qui est farfelu." 
JÉRÔME CAHUZAC A "MENTI", AFFIRME CHARLES DE COURSON
Présidée par l'UDI Charles de Courson, la commission d'une trentaine de députés a ciblé ses investigations sur l'action du gouvernement pendant que M. Cahuzac, alors encore à Bercy, niait en bloc les révélations l'accablant.
Jérôme Cahuzac a "refusé" de répondre et même "menti" sur un des points abordés lors de son audition, a ensuite affirmé Charles de Courson, le présidentUDI de la commission d'enquête parlementaire. "Il a refusé de répondre aux questions extrêmement importantes qu'on lui posait, à quelle date il a transféré son compte de l'UBS à Reyl et à Singapour", a-t-il déclaré. Refuser de répondre est "ce que lui a conseillé son avocat", a-t-il analysé.
"Du point de vue psychologique, il a été égal à lui-même", a ajouté M. de Courson. Il a souligné qu'il avait menti sur un point, à propos de ses relations avec Stéphane Fouks. "Là-dessus, il nous a menti puisque certains journalistes se sont faitappeler par lui-même. Donc dire que M. Fouks n'a joué aucun rôle est faux", a lancé M. de Courson à quelques journalistes. Il s'est aussi montré incrédule sur le fait que l'ancien ministre ait parlé une seule fois de sa situation au premier ministre et au président : "Si ce qu'il dit est vrai, c'est quand même un peu bizarre qu'on reste pendant trois mois dans une situation et personne ne se parle ?", a interrogé M. de Courson.
Il a annoncé que la commission entendrait la semaine prochaine l'ex-banquier deReyl Pierre Condamin-Gerbier, témoin dans l'affaire Cahuzac. Il est aussi envisagé d'auditionner le premier ministre mais "cela n'est pas encore tranché"ainsi que pour l'ancien ministre du nudget Eric Woerth, a-t-il dit.
CAHUZAC : "ILS M'ONT TOUS JUGÉ PAR AVANCE"
Dans la matinée, Jérôme Cahuzac avait assuré à Europe 1 que les parlementaires de la commission d'enquêtes l'ont déjà "tous jugé par avance, même certains qui se disaient mes amis". Il a assuré qu'il "répondrait à toutes les questions des députés" et qu'il s'agissait pour lui "de les aider à savoir s'il y a eu des dysfonctionnements au niveau de l'Etat". L'ancien ministre avait également assuré qu'il "ne sortirait pas du cadre" de l'objet de la commission d'enquête."Pour moi, l'Assemblée n'est plus une tribune, je ne suis plus un élu de la République", a-t-il dit.
"Je suis le bouc émissaire idéal de toutes les turpitudes politiques", a-t-il également lancé, dénonçant la responsabilité qui lui est attribuée dans la défaite du candidat socialiste à l'élection législative de Villeneuve-sur-Lot ou la montée du FN. "J'ai le sentiment d'avoir été dans ma carrière politique toujours irréprochable", a-t-il ajouté.

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